Employeurs : 10 erreurs à ne pas commettre en droit social illustrées par la Cour de cassation en 2024

Rédigé par anne-lise Castell
Publié le 19 août 2024

Des erreurs à ne pas commettre en droit social, il y en a beaucoup ! Les juges nous ont permis d’en relever certaines sur l'année 2024 qui ont pu coûter cher aux employeurs…

1/ Appeler le salarié pour l'avertir de son licenciement

Lorsque vous procédez à un licenciement, il y a un interdit incontournable ; vous ne pouvez pas faire de licenciement verbal. Y compris s’il s’agit juste d’informer le salarié par téléphone avant de lui envoyer la notification de son licenciement. 

La Cour de cassation l’a rappelé dans une affaire où l’employeur avait souhaité par courtoisie avertir le salarié par téléphone le jour même de l’envoi de la lettre de notification.

Cela rend tout simplement le licenciement sans cause réelle et sérieuse. Plus de détails avec notre article : Appeler le salarié pour le prévenir de son licenciement : une erreur qui peut vous coûter cher…

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2/ Renoncer au dernier moment à une clause de non-concurrence et sans y mettre les formes

Si vous souhaitez renoncer à une clause de non-concurrence et ne pas verser de contrepartie au salarié, il faut s’y prendre assez tôt.

Les  juges considèrent que la renonciation doit s’effectuer au plus tard au moment où le salarié quitte l'entreprise. S’il y a dispense de préavis, même partielle, la renonciation doit avoir été faite au plus tard au même moment.

Vous devez aussi respecter les formalités prévues au contrat. Les juges ont ainsi considéré comme non valable une renonciation faite par courriel alors que le contrat de travail imposait une LRAR.

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3/ Tarder avant de licencier pour faute grave

Si vous décidez d’infliger une sanction disciplinaire à un salarié, vous disposez en principe d’un délai de 2 mois pour engager la procédure à compter du jour où vous avez connaissance des faits. L'engagement étant marqué par la convocation du salarié à l’entretien préalable.

Mais ne pensez pas que vous pouvez utiliser tout ce délai pour réfléchir. En effet, la faute grave implique que le salarié ne peut pas rester dans l’entreprise même temporairement. 

Elle risque donc de ne pas se justifier si vous avez gardé le salarié plusieurs semaines sans agir.

La Cour de cassation a confirmé que la mise en oeuvre du licenciement pour faute grave doit intervenir dans un délai restreint après que l'employeur a eu connaissance des faits allégués dès lors qu'aucune vérification n'est nécessaire.

Un délai de 25 jours c’est trop a jugé la Cour de cassation.

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4/ Licencier pour faute plus d’un mois après l’entretien préalable

On reste dans les délais du licenciement avec une autre erreur à ne pas commettre : le licenciement disciplinaire doit intervenir dans le délai d'un mois à compter de l’entretien préalable (sauf dispositions conventionnelles plus favorables).

C’est la notification du licenciement qui compte pour apprécier le délai, ce qui est indiqué dans la lettre importe peu a jugé la Cour de cassation.

Le non-respect de ce délai rend là-encore le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

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5/ Imposer une modification des horaires de travail à un salarié sans tenir compte de sa situation personnelle

Il y a des cas où par exception vous ne pouvez pas imposer de modification d’horaires à vos salariés :

  • si les horaires ont été contractualisés ;
  • si le salarié est protégé (par exemple pour un représentant du personnel) ;
  • ou s’il y a atteinte excessive au droit au respect de la vie personnelle et familiale ou au droit au repos du salarié.

La Cour de cassation a donné une illustration de l’atteinte excessive avec un salarié qui s'occupait de sa fille de 7 ans handicapée à 80 %.

Une situation personnelle compliquée, cela doit forcément être pris en compte…

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6/ Oublier de faire signer le CDD

C’est un grand classique des erreurs à ne pas commettre en droit du travail : concernant un CDD il faut remettre au salarié un contrat écrit, dans les 2 jours, et lui faire signer.

Si le salarié travaille en CDD sans l’avoir signé, il peut demander la requalification en CDI.

Seul cas où les juges la refuseront : si le salarié a délibérément refusé de signer le contrat de travail de mauvaise foi ou dans une intention frauduleuse.

Mais bon courage pour obtenir cette preuve. Un simple refus de signer ne permet pas de conclure à une mauvaise foi. La Cour de cassation l’a rappelé dans une affaire où le salarié a continué de travailler mais a refusé de signer le renouvellement de son CDD, n’étant pas d’accord avec le contenu du contrat.

Pour éviter tout problème, nous vous conseillons de remettre au salarié son CDD dès le jour de l’embauche et de ne pas le laisser commencer à travailler sans l’avoir signé.

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7/ Se croire dispensé à tort d’une recherche de reclassement en cas d’inaptitude

En cas d’inaptitude, vous pouvez être dispensé de recherche de reclassement dès lors que le médecin du travail a expressément indiqué :

  • que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ;
  • ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

S'il s’agit en principe d’une case à cocher, parfois le médecin opte pour une mention manuscrite qui n’est pas tout à fait identique.

Les juges ont en effet déjà considéré qu’il n’y avait pas dispense de recherche de reclassement :

  • si la mention porte sur tout maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise. On peut en effet alors imaginer une recherche au niveau du groupe (Cass. soc., 13 septembre 2023, n° 22-12.970).
  • si la mention indique que l'état de santé du salarié faisait obstacle sur le site à tout reclassement dans un emploi (Cass. soc.,13 décembre 2023, n° 22-19.603).

En revanche, il y a bien dispense si l'avis d’inaptitude indique que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi au lieu de la mention dans un emploi.

Plus de détails avec notre article Inaptitude et recherche de reclassement : attention à bien lire l’avis du médecin du travail avant de vous considérer comme dispensé…

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8 / Ne pas accorder les jours de fractionnement sans renonciation du salarié

Fractionner ses congés payés peut ouvrir droit à 1 ou 2 jours de congés en plus. Mais le salarié peut y renoncer. En l’absence d’accord collectif, la renonciation doit être individuelle.

Il faut ainsi éviter de passer par une note de service générale.

Par contre le fractionnement peut valablement intervenir au moment où le salarié complète le formulaire de demande de congés ont considéré les juges.

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9/ Prendre une sanction disciplinaire sans regarder le règlement intérieur de l’entreprise

C’est le règlement intérieur (obligatoire à partir de 50 salariés) qui va fixer les règles relatives à la discipline dans l’entreprise, notamment la liste des sanctions que vous pouvez prendre. 

Si une sanction ne figure pas dans votre règlement intérieur, vous ne pouvez tout simplement pas la prononcer. Seule exception admise : s’il s’agit d’un licenciement.

Attention, le règlement intérieur peut aussi fixer des formalités à respecter comme consulter le CSE avant de prendre une sanction disciplinaire.

Si le règlement intérieur impose une telle consultation et que vous n’y procédez pas, vous risquez tout simplement l’annulation de la sanction car il s’agit d’une garantie de fond.

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10/ Licencier pour faute un salarié alors que son comportement est en partie lié à son état de santé

Si un licenciement disciplinaire intervient et qu’un lien avec l’état de santé du salarié apparaît, il y a tout simplement nullité du licenciement. 

La Cour de cassation a donné deux illustrations en 2024

Dans la première affaire, une salariée est licenciée pour faute grave en raison de son comportement avec des clients mais elle souffrait d’une pathologie de nature à altérer son comportement. 

Dans la seconde affaire, un salarié a été licencié pour faute alors qu’il avait eu un malaise sur son lieu de travail. 

Sauf inaptitude régulièrement constatée par le médecin du travail, le licenciement d'un salarié en raison de son état de santé est bien nul rappelle la Cour de cassation.

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Références
  • Cour de cassation, chambre sociale, 3 avril 2024, pourvoi n° 23-10.931
  • Cour de cassation, chambre sociale, 3 juillet 2024, pourvoi n° 22-17.452
  • Cour de cassation, chambre sociale, 29 mai 2024, pourvoi n° 22-21.814
  • Cour de cassation, chambre sociale, 12 juin 2024, pourvoi n ° 23-13.522
  • Cour de cassation, chambre sociale, 19 juin 2024, pourvoi n° 22-22.435
  • Cour de cassation, chambre sociale, 20 mars 2024, pourvoi n° 22-17.292
  • Cour de cassation, chambre sociale, 22 mai 2024, pourvoi n° 22-11.623
  • Cour de cassation, chambre sociale, 17 janvier 2024, pourvoi n° 22-13.144
  • Cour de cassation, chambre sociale, 7 mai 2024, pourvoi n° 23-10.886
  • Cour de cassation, chambre sociale, 20 mars 2024, pourvoi n° 23-13.876

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