Adresser un premier courrier à un salarié en lui faisant des reproches peut constituer une sanction disciplinaire. Et vous empêcher par la suite de prononcer un licenciement en raison des faits déjà sanctionnés. Illustration avec une affaire du 29 mai 2024.
Il y a un grand principe en droit : vous ne pouvez pas sanctionner deux fois un salarié pour des mêmes faits. Si vous avez réagi à chaud, par exemple en lui adressant un avertissement, et que par la suite vous décidez finalement de sévir et de prononcer une sanction plus lourde, ce n’est tout simplement pas possible. On dit que vous avez épuisé votre pouvoir disciplinaire.
Dans un tel cas de figure, le salarié pourra demander l'annulation de la 2nde sanction. Et faire tomber son licenciement le cas échéant.
Bon à savoir : Seule exception : si le comportement fautif du salarié s’est poursuivi après la 1re sanction. Dans ce cas, il est possible de prendre une nouvelle sanction.
La difficulté c’est que parfois les employeurs n’ont pas conscience d’avoir pris une première sanction. Ils ont juste adressé un courrier au salarié. Or, si ce courrier contient des reproches, il peut s’agir d’un avertissement malgré la volonté de l’employeur. Rappelons en effet que l’avertissement comme le blâme ne nécessite pas le suivi de la procédure disciplinaire (sauf exceptions). Et la frontière est parfois très mince entre la simple observation et l’avertissement.
Les juges viennent de nous en donner un exemple.
Lorsqu'il existe, c'est le règlement intérieur de l’entreprise (obligatoire à partir de 50 salariés), ou une note de service, qui fixe les sanctions qui peuvent être prises. Si une sanction ne figure pas dans le règlement intérieur de votre entreprise, vous ne pouvez tout simplement pas la prononcer (sauf s’agissant d’un licenciement disciplinaire).
Dans cette affaire, une salariée médecin s’est vu notifier des lettres de « mise en garde ». Il était notamment reproché à la salariée d’avoir refusé de prendre en charge le patient d’un collègue et il lui était demandé de ne plus reproduire ce type de comportement. Dans une seconde lettre, il lui était reproché d’avoir gravement mis en cause le directeur de l’association.
L’employeur faisait valoir que dans ces lettres, il se bornait à alerter la salariée en lui demandant de modifier son comportement et que cela ne constituait donc pas une sanction disciplinaire.
Mais les juges ne suivent pas. Dans la lettre, l’employeur adressait des reproches à la salariée, pour des faits qu'il estimait fautifs. Cela constitue donc bien une sanction disciplinaire.
Notez que cette position n’est pas nouvelle et que de nombreuses décisions de justice nous éclairent sur les limites à ne pas franchir. Ont ainsi été reconnus comme des sanctions :
Cela doit vous conduire à toujours bien réfléchir avant d’envoyer un mail ou une lettre à un salarié sous le coup de l’émotion, de façon à ne pas vous priver de toute possibilité de sanction ultérieure.
Des questions sur les différentes sanctions disciplinaires ? L’équipe Qiiro à votre disposition peut notamment vous aider à établir votre règlement intérieur et l’échelle des sanctions.