Question compliquée depuis la disparition de cette obligation du Code du travail en 2017. Même les cours d’appel ne sont pas d'accord entre elles…
Le Code du travail n’impose pas aujourd’hui à l’employeur de prendre en charge les frais de télétravail. Cela a été supprimé il y a plus de 7 ans (ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail qui a modifié l’article L. 1222-10 du Code du travail).
La Cour d’appel de Paris vient de s’appuyer sur la disparition de l’obligation en 2017 pour rejeter la demande de dommages et intérêts d’une salariée qui n’avait eu aucune prise en charge des frais liés au télétravail.
Elle a également souligné dans cette affaire :
S’il n’y a rien dans le Code du travail, il y a par contre deux ANI (accord national interprofessionnel).
Le premier date du 19 juillet 2005 et a été étendu en 2006. Il indique que l’employeur prend en charge, dans tous les cas, les coûts directement engendrés par ce travail, en particulier ceux liés aux communications.
Le second date du 26 novembre 2020 et a été étendu en avril 2021. Il prévoit qu’il appartient à l’entreprise de prendre en charge les dépenses qui sont engagées par le salarié pour les besoins de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’entreprise, après validation de l’employeur. Le choix des modalités de prise en charge éventuelle des frais professionnels peut être, le cas échéant, un sujet de dialogue social au sein de l’entreprise.
Cet article est étendu sous réserve que la validation de l'employeur soit interprétée comme étant préalable, et non postérieure, à l'engagement des dépenses par le salarié.
Ces ANI s'appliquent à toutes les entreprises et les salariés compris dans leur champ d'application. Autrement dit, ils vous concernent si votre secteur professionnel est représenté par les organisations patronales signataires (MEDEF, CPME ex-CGMPE et U2P).
Important : Les dispositions des ANI peuvent être écartées par la conclusion d'un accord d'entreprise, d'établissement ou de groupe sur le télétravail mais pas par une charte (C. trav., art. L. 2252-1 et L. 2252-3).
La Cour de cassation n’a pas rendu de décision récente sur l’indemnisation des frais du télétravail. Mais de façon plus globale, elle considère que les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur sont pris en charge (notamment Cass. soc., 8 novembre 2017, 16-14.664).
On pourrait donc penser que cela s’applique aux frais du télétravail.
Très récemment la Cour d’appel de Versailles a d’ailleurs jugé que la prise en charge s’imposait.
En s'appuyant sur les ANI, elle considère que la prise en charge des frais exposés dans le cadre du télétravail, y compris en cas de circonstances exceptionnelles comparables à la crise sanitaire, est obligatoire pour l'employeur. Peu importe qu’elle ne soit pas prévue par un accord ou la charte sur le télétravail.
Elle précise également que le montant de l'indemnisation forfaitaire ne peut être inférieur aux frais réellement engagés. En l’absence de fixation par l’employeur les juges peuvent se baser sur le plafond de prise en charge exonérée de cotisations sociales de l’URSSAF.
Il faudra donc suivre attentivement ce qu'en dira la Cour de cassation. Mais le comportement le plus prudent pour vous est sans doute d'envisager d’emblée la question de l’indemnisation dans les accords ou la charte sur le télétravail.
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