Cela va bientôt faire un an qu’un salarié qui abandonne son poste peut être présumé démissionnaire. Mais le dispositif continue pourtant d’interroger.
Il y a deux textes à connaître.
Le premier c’est la loi sur le fonctionnement du marché du travail (loi n° 2022-1598) qui a tout simplement créé la présomption de démission en cas d’abandon de poste.
Le second, un décret du 17 avril 2023 (n° 2023-275) qui a détaillé la mise en oeuvre du dispositif et permis son entrée en vigueur au 19 avril 2023.
Dès le départ, l'objectif principal a été assumé : priver de tout droit au chômage un salarié qui ne donne plus de nouvelles à son employeur sans explications. Les pouvoirs publics ont en effet considéré que le fait qu’un salarié licencié suite à un abandon de poste ait accès à des conditions d’indemnisation plus favorables qu’un salarié qui démissionne était « une faille ».
L’envoi d’une mise en demeure par l’employeur
Si un salarié abandonne son poste volontairement (autrement dit s’il n’est pas au travail sans vous expliquer), vous pouvez le mettre en demeure de justifier son absence et reprendre son poste.
Comment ? Par un courrier (LRAR ou remise en main propre contre décharge).
Dans ce courrier il faut :
Le ministère du Travail conseille également d’indiquer dans ce courrier que le salarié qui n’apporte pas de justification valable dans les temps sera considéré comme démissionnaire et n’aura en conséquence pas droit aux allocations chômage.
Il est également utile d’apporter des précisions sur la rupture, notamment comment ça se passe pour le préavis (celui-ci devant normalement être effectué pour un salarié démissionnaire). Vous pouvez par exemple lui indiquer qu’en cas de silence vous considérez qu’il refuse d’exécuter le préavis.
Attention : Ne vous précipitez pas avant d’envoyer un courrier de mise en demeure. Laissez un peu de temps à votre salarié pour justifier son absence et surtout essayez d’abord de le contacter pour savoir comment il va.
La réponse du salarié
Plusieurs situations peuvent se présenter ;
Il en va de même si le salarié répond qu’il ne reviendra pas ;
Le salarié peut contester la rupture de son contrat s’il avait un motif légitime. Une liste de motifs nous est donnée par le décret mais il peut y en avoir d’autres :
Une procédure spéciale s’applique puisque l’affaire va directement devant le bureau de jugement qui statue dans un délai d’un mois.
Aujourd’hui un employeur peut-il toujours passer par une procédure disciplinaire en cas d’absence injustifiée ou doit-il nécessairement utiliser la présomption de démission ?
A la lecture de la loi et du décret, le recours à la présomption de démission ne semble pas obligatoire. Mais le ministère du Travail a contribué à entretenir le flou en publiant un questions-réponses en avril 2023 dans lequel il a précisé que l’employeur qui entendait rompre le contrat d’un salarié abandonnant son poste devait utilisait la présomption de démission et n’avait plus vocation à engager un licenciement pour faute (absence injustifiée),
Ce questions-réponses a été vivement critiqué et a été retiré par le Gouvernement après avoir été contesté devant le Conseil d’Etat.
Car on ne peut pas dire que la rédaction de la loi comme du décret impose quoi que ce soit.
Un choix entre la présomption de démission et le licenciement pour faute est donc à notre sens parfaitement envisageable.
L’absence injustifiée peut conduire à un licenciement pour faute grave mais ce n’est pas automatique. Récemment les juges ont ainsi refusé de reconnaître une faute grave pour un salarié avec plus de 20 ans d’ancienneté qui accompagnait sa mère malade et isolée (Cass. soc., 17 janvier 2024, n° 22-24.589).
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