Qu’est-ce qu’une prestation compensatoire ? Comment est-elle calculée ? Quelle est sa fiscalité ? Peut-on demander une révision de la prestation compensatoire ?
Votre assistant juridique augmenté Qiiro répond à toutes vos questions et vous explique tout ce qu’il faut savoir sur la prestation compensatoire.
Une prestation compensatoire est définie à l’article 270 du Code civil comme une somme “destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives” des ex-époux.
Un divorce peut en effet avoir des conséquences sur les conditions de vie respectives des ex-époux. Celui-ci mettant fin au devoir de secours des époux durant le mariage, l’un des ex-époux peut se retrouver dans une situation économiquement difficile.
La prestation compensatoire a pour objet de remédier à cette situation.
La prestation compensatoire peut être décidée dans une convention entre les ex-époux ou bien par une décision du juge.
Dans le cadre d’un divorce par consentement mutuel, les ex-époux peuvent fixer le montant et les modalités de la prestation compensatoire dans une convention établie sous seing privé et contresignée par leurs avocats ou dans une convention qu’ils soumettent à l’homologation du juge quand un enfant a demandé à être entendu (article 278 du Code civil).
Pendant une procédure de divorce devant le juge, les ex-époux ont également la possibilité de soumettre à l’homologation du juge une convention qui porte sur la prestation compensatoire (articles 268 et 279-1 du Code civil).
Par la convention, les ex-époux ont la possibilité de prévoir que le versement de la prestation compensatoire cessera à compter de la réalisation d’un événement déterminé.
Important : Le juge n’est pas tenu d’homologuer la convention qui lui a été soumise par les ex-époux s’il estime que celle-ci fixe de manière inéquitable les droits et obligations des ex-époux.
Pour obtenir le versement d’une prestation compensatoire, la demande doit être formée au cours de la procédure de divorce.
Le juge peut refuser une telle demande : “Toutefois, le juge peut refuser d’accorder une telle prestation si l’équité le commande, soit en considération des critères prévus à l’article 271, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l’époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au regard des circonstances particulières” (article 270 alinéa 3 du Code civil).
Le juge qui reçoit la demande n’est donc pas tenu de l’accorder et apprécie au cas par cas selon la situation des intéressés si la prestation compensatoire doit être accordée ou non.
L’article 271 du Code civil précise que : “La prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible”.
Pour ce faire, le juge peut prendre en considération plusieurs éléments tels que :
✍ BON À SAVOIR
La jurisprudence considère que la vocation successorale ne constitue pas un droit prévisible (Cass., Civ. 1ère, 21 sept. 2005, n°04-13.977).
La prestation compensatoire est évaluée à la date du prononcé du divorce et devient exigible le jour où le prononcé du divorce est devenu définitif.
Néanmoins, la décision peut être assortie de l’exécution provisoire, à titre exceptionnel, lorsque l’absence d’exécution immédiate aurait des conséquences manifestement excessives pour l’ex-époux bénéficiaire de la prestation compensatoire en cas de recours sur la prestation compensatoire alors que le prononcé du divorce a acquis force de chose jugée (article 1079 du Code civil).
La loi ne prévoit pas de barème ou de méthode de calcul en matière de prestation compensatoire.
Certains praticiens du droit se sont donc proposés de mettre en place des méthodes de calcul enfin de faciliter le calcul de la prestation compensatoire :
Bien sûr, le juge n’est pas tenu légalement tenu de suivre l’une de ces méthodes. Ces méthodes sont donc simplement données à titre d’exemples.
Dans cette méthode, il s’agit de déterminer la différence de revenus annuels de chacun des époux. Puis, il faut diviser cette différence par ⅓ et la multiplier par ½ de la durée du mariage.
Par exemple :
Différence de revenus = 15 000 €.
Durée du mariage = 20 ans.
⅓ de la différence de revenus = 5 000 € (15 000 / 3).
½ de la durée du mariage = 10 ans.
= (⅓ x 15 000) x (½ x 20) = 50 000 €.
Dans cette méthode, il s’agit de diviser par 2 la différence de revenus mensuels entre les époux pour déterminer l’unité de mesure.
Des points sont ensuite attribués en fonction de certains critères : âge du créancier de la prestation et durée du mariage. Ces points sont multipliés par 3 pour déterminer l’unité de compensation.
Barème - Âge du créancier :
Barème - Durée du mariage :
Enfin, l’unité de compensation est multipliée par l’unité de mesure.
Par exemple :
Différence de revenus mensuels = 1 500 €.
Unité de mesure = 750 €.
Époux B, créancier est âgé de 45 ans = 4 points.
La durée du mariage est de 20 ans = 15 points.
Unité de compensation = 57 (19 x 3).
57 x 750 = 42 750 €.
Cette méthode consiste à multiplier 20 % de la différence des revenus annuels par 8.
Par exemple :
Différence des revenus annuels = 15 000 €.
20 % de la différence des revenus annuels = 3 000 €.
8 x 3 000 = 24 000 €.
La prestation compensatoire, lorsqu’elle est accordée par le juge, peut prendre deux formes :
Lorsque la prestation compensatoire est versée sous forme de capital, il peut s’agir :
Lorsque la prestation compensatoire prend la forme d’une somme d’argent à verser et que l’ex-époux qui doit la verser n’est pas en mesure de le faire, le juge peut fixer des modalités de paiement.
Dans ce cas en effet, le juge peut prévoir que la prestation compensatoire sera versée périodiquement de la même manière que pour les pensions alimentaires, dans la limite de 8 années.
À titre exceptionnel et par décision spécialement motivée, le juge peut également décider de fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère.
Cela pourra être le cas lorsque l’âge ou l’état de santé du créancier (ex-époux qui reçoit la prestation compensatoire) ne lui permet pas de subvenir à ses besoins (article 276 du Code civil).
La prestation compensatoire peut être déduite des revenus ou bien il est possible de bénéficier d’une réduction d’impôt.
Lorsque la prestation compensatoire est versée sous forme de capital :
Lorsque la prestation compensatoire est versée sous forme de rente : la personne qui verse la prestation peut déduire de ses revenus les prestations compensatoires versées.
Les montant des sommes versées doivent être indiqués sur la déclaration de revenus.
La personne qui reçoit la prestation compensatoire doit déclarer les versements en capital ou rentes perçus sur une période de 12 mois comme prestations compensatoires.
Si la prestation compensatoire est versée dans les 12 mois qui suivent le jugement de divorce, alors elle ne constitue pas un revenu imposable.
Oui, il est tout à fait possible, sous certaines conditions, de demander au juge la révision d’une prestation compensatoire.
Pour demander la révision d’une prestation compensatoire en justice, il faut d’abord prouver qu’un changement important est intervenu dans les ressources ou les besoins de l’ex-époux qui la verse ou de l’ex-époux qui la reçoit.
Par exemple, concernant les situations qui peuvent justifier d’un changement important dans les ressources de l’ex-époux qui verse la prestation compensatoire, il pourra s’agir d’une perte d’emploi ou encore la découverte d’une maladie grave qui limite/rend impossible son activité professionnelle.
D’autres évènement peuvent venir augmenter les charges de l’ex-époux qui doit payer la prestation compensatoire et provoquer un changement important de situation. Il peut par exemple s’agir de la naissance d’un enfant.
S’agissant des situations qui peuvent justifier un changement important dans les besoin de l’ex-époux qui reçoit la prestation compensatoire, il pourra par exemple s’agir d’un remariage. Dans ce cas en effet, la participation du nouvel époux aux dépenses diminue les charges et donc les besoins de l’ex-époux qui reçoit la prestation.
Important : Depuis le 1er janvier 2020, les ex-époux sont obligés de constituer avocat en matière de demande de révision de prestation compensatoire.
Les possibilités de demander une révision de la prestation compensatoire au juge varie selon la forme de la prestation compensatoire : prestation compensatoire versée sous forme de capital ou de rente viagère.
La demande de révision d’une prestation compensatoire versée sous forme de capital est possible mais largement limitée.
Elle peut être demandée lorsque le débiteur (ex-époux qui doit la payer) connaît un changement important de sa situation.
Lorsque la prestation compensatoire est versée sous forme de capital, il s’agit d’une somme d’argent que le débiteur verse en une seule fois ou en plusieurs mensualités selon ce qui a été prévu.
Le montant total de la prestation compensatoire est déjà connu et prédéfini.
Dans ce cas, le juge peut uniquement réviser les modalités de versement de la prestation compensatoire (article 275 alinéa 2 du Code civil).
Le juge peut en effet autoriser, à titre exceptionnel, le versement du capital sur une durée totale supérieure à 8 ans.
Il n’est, dans ce cas, pas possible de demander au juge de suspendre ou supprimer la prestation compensatoire. De même, il n’est pas possible de demander au juge la diminution du montant du capital.
Le débiteur ne peut que demander un échelonnement de son paiement.
Lorsque la prestation compensatoire prend la forme d’une rente viagère, il est possible de demander sa révision.
Les possibilités de révision d’une prestation compensatoire versée sous forme de rente viagère sont plus nombreuses que les possibilités de révision une prestation compensatoire versée sous forme de capital.
La révision pourra être demandée en cas de changement important dans les ressources ou les besoins de l’un ou de l’autre des ex-époux (article 276-3 du Code civil).
Dans ce cas, le juge a en effet la possibilité de :
Dans tous les cas, la révision ne peut avoir pour effet de porter le montant de la rente à un montant supérieur à celui qui avait été initialement fixé par le juge.
✍ BON À SAVOIR
Lorsque la prestation compensatoire a été fixée sous forme de rente, son débiteur a la possibilité de saisir, à tout moment, le juge d’une demande de substitution d’un capital à tout ou partie de la rente (article 276-4 du Code civil).
En cas de décès de celui qui verse la prestation, le paiement de celle-ci (quelle que soit sa forme) est prélevé sur la succession (article 280 du Code civil) dans les limites de l’actif successoral.
Lorsqu’il a été prévu que le capital serait payable en plusieurs fois, celui-ci devient immédiatement exigible.
Lorsque la prestation compensatoire avait été fixée sous forme de rente, il lui est substitué un capital immédiatement exigibles.
Les héritiers peuvent néanmoins décider de maintenir les conditions de règlement de la prestation compensatoire fixées avant le décès du débiteur en s’obligeant personnellement au paiement de la prestation (article 280-1 du Code civil).
Cette décision des héritiers doit être prise à l’unanimité et doit être constatée par un acte notarié à peine de nullité.
✍ BON À SAVOIR
Les héritiers qui décident de maintenir le versement de la prestation compensatoire dans les mêmes conditions qu’avant le décès du débiteur disposent des mêmes droits que ce dernier. Ils peuvent demander, individuellement, la révision de la prestation en cas de changement important.