Abandon de poste et présomption de démission : quelles sont les règles en 2025 ?

Article Rédigé par anne-lise Castell
Publié le 10 janvier 2025

En avril prochain, cela fera 2 ans qu’un salarié qui abandonne son poste peut être présumé démissionnaire. Mais le dispositif continue pourtant d’interroger. Il a été validé fin 2024 par le Conseil d’Etat qui a apporté des précisions.

Abandon de poste et démission présumée : que prévoient les textes ?

Il y a deux textes à connaître.

Le premier c’est la loi sur le fonctionnement du marché du travail (loi n° 2022-1598) qui a tout simplement créé la présomption de démission en cas d’abandon de poste. 

Le second, un décret du 17 avril 2023 (n° 2023-275) qui a détaillé la mise en oeuvre du dispositif et permis son entrée en vigueur au 19 avril 2023.

Dès le départ, l'objectif principal a été assumé : priver de tout droit au chômage un salarié qui ne donne plus de nouvelles à son employeur sans explications. Les pouvoirs publics ont en effet considéré que le fait qu’un salarié licencié suite à un abandon de poste ait accès à des conditions d’indemnisation plus favorables qu’un salarié qui démissionne était « une faille ».

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Mais comment marche exactement la présomption de démission ?

L’envoi d’une mise en demeure par l’employeur

Si un salarié abandonne son poste volontairement (autrement dit s’il n’est pas au travail sans s’expliquer), l’employeur peut le mettre en demeure de justifier son absence et reprendre son poste.

Comment ? Par un courrier (LRAR ou remise en main propre contre décharge).

Ce courrier doit contenir :

  • une demande de justification de l’absence ;
  • et de reprendre le travail dans un délai limite après quoi il sera présumé démissionnaire. Sachant que ce délai ne peut pas être inférieur à 15 jours calendaires (=week-end et jours fériés compris) à compter de la date de présentation de la mise en demeure.

Le ministère du Travail conseille également d’indiquer dans ce courrier que le salarié qui n’apporte pas de justification valable dans les temps sera considéré comme démissionnaire et n’aura en conséquence pas droit aux allocations chômage.

Il est également utile d’apporter des précisions sur la rupture, notamment comment ça se passe pour le préavis (celui-ci devant normalement être effectué pour un salarié démissionnaire). 

Important : fin 2024, le Conseil d’Etat a considéré que pour que la démission puisse être présumée, le salarié doit nécessairement être informé des conséquences que pourrait avoir l’absence de reprise du travail sans motif légitime (dans la mise en demeure).

La réponse du salarié

Plusieurs situations peuvent se présenter ;

  • si le salarié répond avec un motif légitime dans le délai requis, la procédure s’arrête là ;
  • si le salarié ne répond pas, ou donne un motif farfelu, mais revient avant la fin du délai, son contrat se poursuit. Il n’est par contre pas rémunéré pour le temps précis de l’absence. Mais il peut être sanctionné pour absence injustifiée ;
  • si le salarié ne répond pas et ne revient pas, il est présumé démissionnaire et n’a pas le droit au chômage. L’employeur doit alors lui remettre les documents de fin de contrat et mentionner comme type de rupture du contrat « Démission ». Le salarié n’a droit qu’à une indemnité compensatrice de congés payés. Il en va de même si le salarié répond qu’il ne reviendra pas ;
  • si le salarié répond avec un motif légitime mais juste hors délai : c’est sans doute la situation la plus complexe. A la lecture des textes, la présomption de démission peut jouer. Mais le salarié peut tenter de contester la rupture.
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 Le salarié peut contester la rupture de son contrat s’il avait un motif légitime. Une liste de motifs nous est donnée par le décret mais il peut y en avoir d’autres :

  • des raisons médicales ;
  • l'exercice du droit de retrait ;
  • l'exercice du droit de grève ;
  • le refus d'exécuter une instruction contraire à une réglementation ou la modification du contrat de travail à l'initiative de l'employeur.

Une procédure spéciale s’applique puisque l’affaire va directement devant le bureau de jugement qui statue dans un délai d’un mois.

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Une interrogation restante sur la nécessité de passer par cette procédure

Aujourd’hui un employeur peut-il toujours passer par une procédure disciplinaire en cas d’absence injustifiée ou doit-il nécessairement utiliser la présomption de démission ?

A la lecture de la loi et du décret, le recours à la présomption de démission ne semble pas obligatoire. Mais le ministère du Travail a contribué à entretenir le flou en publiant un questions-réponses en avril 2023 dans lequel il a précisé que l’employeur qui entendait rompre le contrat d’un salarié abandonnant son poste devait utilisait la présomption de démission et n’avait plus vocation à engager un licenciement pour faute (absence injustifiée),

Ce questions-réponses a été vivement critiqué et a été retiré par le Gouvernement après avoir été contesté devant le Conseil d’Etat.

Car on ne peut pas dire que la rédaction de la loi comme du décret impose quoi que ce soit.

Un choix entre la présomption de démission et le licenciement pour faute est donc à notre sens parfaitement envisageable. Il semble impossible qu’un salarié puisse contester le fait d’avoir choisi la voie du licenciement.

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L'absence injustifiée peut conduire à un licenciement pour faute grave mais ce n’est pas automatique. En 2024, les juges ont ainsi refusé de reconnaître une faute grave pour un salarié avec plus de 20 ans d’ancienneté qui accompagnait sa mère malade et isolée (Cass. soc., 17 janvier 2024, n° 22-24.589).

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Références
  • Conseil d’Etat, 1re et 4e chambres réunies, 18 décembre 2024, n° 473640, 473680, 474392, 475097, 475100, 475194
  • Cour de cassation, chambre sociale, 17 janvier 2024, pourvoi n° 22-24.589
  • Décret n° 2023-275 du 17 avril 2023 sur la mise en œuvre de la présomption de démission en cas d'abandon de poste volontaire du salarié, Jo du 18
  • Loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022 portant mesures d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi, Jo du 22
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