Liberté d’expression : un abus si on critique son directeur ?

Article Rédigé par anne-lise Castell
Mis à jour le 11 décembre 2024

Lorsqu’on critique son supérieur hiérarchique ou des membres de la direction, il convient d’être mesuré car la liberté d’expression ne protège pas de tout. Attention aux critiques excessives, surtout devant les autres… Retour sur ce sujet avec une nouvelle décision du 11 décembre 2024.

La liberté d'expression est protégée sauf abus

Chaque salarié bénéficie dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression. 

Il est donc possible de s’exprimer sur le fonctionnement de l’entreprise et donner sa pensée. 

Votre employeur ne peut poser des limites que si :

  • elles sont justifiées par la nature de la tâche à accomplir ;
  • et proportionnées au but recherché.

Attention toutefois aux abus. Si un salarié à des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs il peut être sanctionné.

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Aux juges d’apprécier au cas par cas !

Tout va dépendre en pratique de la nature des propos bien entendu, mais leur degré de diffusion, le poste du salarié dans l’entreprise peuvent aussi être pris en compte.

La Cour de cassation est généralement plus tolérante si les critiques sont adressées exclusivement au supérieur hiérarchique et ne sont pas étalées devant les autres salariés (voir notamment Cass. soc., 8 février 2000, n° 97-45.368 contre Cass. soc., 20 janvier 1999, n° 96-44.944 sur une note adressée à l’ensemble du personnel avec la volonté affichée de soulever l’opinion générale contre le directeur).

Mais même des propos tenus en dehors du temps et du lieu de travail peuvent être sanctionnés. Par exemple s’ils sont adressés à un autre salarié de l'entreprise afin de donner une mauvaise image de ses dirigeants et créer un malaise. Il y a manquement à l’obligation de loyauté (Cass. soc., 15 juin 2022, n° 21-10.572).

L’année dernière la Cour de cassation a également reconnu un abus concernant un salarié qui avait émis des critiques à l'égard de son supérieur hiérarchique en des termes insultants et irrespectueux : J'aimerais que tes réponses soient en correspondance avec ton poste de manager et je ne veux plus de ce type de réponse bidon ; il avait aussi critiqué d’autres collègues de façon réitérée (Cass. soc., 14 juin 2023, n° 21-21.678).

La Cour de cassation nous a donné une autre illustration en décembre 2024 de termes injurieux et excessifs. Le salarié avait détourné l'appellation « EPD » (entretien progrès développement) en répondant à son collègue en ces termes « on peut vraiment dire : le PD » pour désigner le directeur général. Il s’agissait d’un abus dans l'exercice de la liberté d'expression, peu important le caractère restreint de la diffusion de ces propos.

En mai 2024, elle a à l’inverse écarté tout abus pour des propos vifs envers le directeur.

Dans cette affaire, un salarié est licencié après avoir adressé à son directeur une lettre de reproches. La cour d’appel constate que dedans, le salarié reproche à son directeur d'être homophobe, de « baratiner » ses salariés sur différents points, mais est également dénigrant quand il lui reproche personnellement de graves dysfonctionnements dans l'entreprise.  Elle estime que ces propos excèdent l'exercice normal de la liberté d'expression.

Mais la Cour de cassation n’est pas du même avis. Les termes, même vifs, employés par le salarié dans le courrier adressé uniquement au directeur pour critiquer sa gestion de l'entreprise et du personnel et dénoncer un harcèlement dont il s'estimait victime, ne caractérisaient pas un abus dans sa liberté d'expression.

Idem avec une décision du 23 octobre 2024.

Ici l’employeur reprochait au salarié d'avoir manqué à ses missions managériales en portant des jugements négatifs à l'encontre de la direction. La cour d’appel avait relevé que d'autres salariés ont témoigné de la défiance qu'il manifestait lors des réunions des directeurs de secteur vis-à-vis de la direction, qu'il estimait sans stratégie et mal entourée, propos réitérés à plusieurs reprises. Pour la cour d’appel, cela dépassait manifestement la liberté de parole à laquelle ce salarié pouvait prétendre et le grief de dénigrement de l'employeur était établi. La Cour de cassation ne suit pas. Il n’a pas été constaté ici que les propos du salarié étaient injurieux, diffamatoires ou excessifs, l’affaire sera donc rejugée…

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Des questions sur la liberté d’expression ? L’équipe Qiiro est à votre disposition.

Références
  • Cour de cassation, chambre sociale, 11 décembre 2024, pourvoi n°23-20.716
  • Cour de cassation, chambre sociale, 23 octobre 2024, pourvoi n° 22-23.823
  • Cour de cassation, chambre sociale, 29 mai 2024, pourvoi n° 22-20.359
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