Dans l’hypothèse où un accord collectif n’est pas appliqué par l’employeur, un syndicat peut-il aller en justice ? Il y a-t-il des conditions ou limites ? Illustration avec plusieurs décisions de mai et novembre 2024.
Un syndicat professionnel peut aller devant le juge pour l’intégralité des faits portant un préjudice à l'intérêt collectif de la profession qu'il représente. On parle alors d’intérêt à agir. Le préjudice pouvant concerner l’ensemble de la profession mais aussi juste un travailleur. Bien souvent un syndicat va venir agir en parallèle d’une action d’un salarié contre l’employeur.
Attention, le syndicat ne peut pas obtenir une régularisation individuelle pour un salarié. Il peut seulement obtenir :
Retrouvez plus de précisions sur les délais pour agir avec notre article Action d’un syndicat : combien de temps pour agir ?
Là où ça se complique, c’est qu’il n’y a pas de liste définie des situations dans lesquelles les syndicats ont un intérêt à agir, ce sont les juges qui nous donnent des exemples au fur et à mesure des situations qui se présentent à eux.
Voyons deux exemples récents.
Dans la première affaire, qui date de mai, un accord collectif a été signé intitulé « grille de classification et rémunération ».
Un syndicat estimait qu’avec cet accord, l’employeur s’était engagé à garantir aux salariés un certain taux d'augmentation de leurs salaires bruts. Il agit donc en justice pour obtenir sa condamnation à procéder :
La cour d'appel considère alors que le syndicat ne pouvait pas engager son action devant le tribunal judiciaire sans mettre en cause les autres syndicats signataires de l'accord.
Mais la Cour de cassation rappelle que tous les syndicats professionnels, qu'ils soient ou non signataires, sont recevables à demander l'exécution d'une convention ou d'un accord collectif de travail, même non étendu. Son inapplication causant nécessairement un préjudice à l'intérêt collectif de la profession.
L'action du syndicat n'est pas subordonnée à la mise en cause de tous les signataires de l'accord.
Dans une seconde affaire qui date de novembre 2024, il s’agissait cette fois du respect d’un accord concernant le gel et le dégel des échelons du personnel navigant commercial. La Cour de cassation confirme que le syndicat a intérêt à agir pour revendiquer l’application de cet accord et mettre fin à l'irrégularité. En revanche, il ne peut pas demander à ce que la carrière des salariés soit reconstituée en termes de progression d'échelon, ni de procéder au rattrapage salarial de ces salariés. Cela tend en effet à la régularisation de la situation individuelle des salariés concernés.
Idem avec une autre affaire du même jour concernant un employeur qui n'avait pas maintenu toute la rémunération pendant un jour férié chômé au motif qu'il y avait une période d'activité partielle. Le syndicat a pu faire valoir le non-respect de la convention collective concernant la rémunération pendant les jours fériés chômés mais n'a pas obtenir la régularisation de la situation des salariés concernés avec un rappel de salaires (voir notre article sur cette affaire).
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