L’employeur ne peut décider d’introduire dans l’entreprise le recours à l'intelligence artificielle (IA) sans vous consulter. S’il ne le fait pas ou déploie l’IA avant que vous ayez rendu votre avis, vous pouvez demander la suspension de l’IA devant le juge des référés.
A partir de 50 salariés, le CSE doit être informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise. Et notamment sur l'introduction de nouvelles technologies ou tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (Code du travail. art. L. 2312-8).
Autrement dit, avant d'introduire le recours à l’IA dans l'entreprise, votre employeur doit procéder à une information-consultation.
Focus rôle CSE
Votre rôle en tant qu’élu ? Etudier quels pourraient être les impacts directs pour les salariés :
Lorsque l’employeur met en œuvre un projet sans respecter l’obligation d’information-consultation préalable du CSE, ce dernier peut saisir le juge des référés pour demander la suspension du projet.
Illustration vient d’en être donnée à propos de l’IA avec une décision récente du tribunal judiciaire de Nanterres qui a donné raison à un CSE qui demandait la suspension d’un projet d’application de l’intelligence artificielle jusqu’à ce qu’il ait donné son avis. En l’espèce, le CSE n’avait en effet pas encore donné son avis car il avait saisi un expert et était encore dans le délai de 2 mois pour rendre son avis ; mais l’employeur avait démarré une phase pilote des nouveaux outils de l’IA. Le juge des référés a ordonné une suspension des nouveaux outils jusqu’à la clôture de la consultation avec une astreinte de 1000 euros par infraction constatée. Il a aussi constaté qu’en mettant en oeuvre le projet soumis à la consultation du CSE avant qu’il ne puisse rendre son avis, cela a nécessairement porté atteinte à ses prérogatives et a condamné l’employeur à lui verser une provision de 5000 euros
Un rapport a été dévoilé en mars 2024 par la commission de l’intelligence artificielle qui a été réunie en septembre 2023 par le Gouvernement pour étudier les opportunités de l’IA.
Il souligne qu’en pratique le droit à l’information et l’avis éclairé des représentants du personnel sur les transformations au travail sont malheureusement peu mobilisés. Car le numérique et l’IA sont présentés comme des “sujets techniques que les travailleurs et les employeurs ont du mal à appréhender.” Il y a un manque d’information mais aussi de formation sur ces enjeux et outils.
La commission souhaite d’ailleurs renforcer le dialogue social préalable au déploiement d’un système d’IA. Elle alerte sur le fait qu’il faut s’assurer que les informations-consultations sur l’IA en tant que nouvelle technologie soient bien menées.
Dans un second rapport destiné à l'administration, la commission suggère une modification de l’article L. 2312-38 du Code du travail si le dialogue social ne se fait pas sur le sujet . L’idée serait d’y insérer une obligation de consultation avant le déploiement de systèmes d’IA dans le recrutement, la gestion du personnel et le contrôle de l’activité des salariés. Lorsque les systèmes d’IA sont évolutifs, ces informations et consultations doivent être périodiques.
Ce rapport souligne aussi la nécessité pour les partenaires sociaux, dont le CSE, d’être formés et actifs sur le sujet de l’IA.
La commission souhaiterait inscrire dans l’agenda social des partenaires sociaux la négociation d’un accord national interprofessionnel (ANI) sur le numérique et l’IA. Cet accord pourrait notamment intégrer des initiatives de formation et sensibilisation à l’IA.
Des questions sur les consultations obligatoires du CSE ? Contactez les juristes Qiiro.