Plusieurs décisions importantes ont été rendues concernant le droit au respect de la vie privée. Si globalement le salarié est protégé, le droit à la preuve peut justifier une atteinte proportionnée au respect de la vie privée.
Tout salarié a droit au respect de sa vie privée. Les faits qu’il commet en dehors de l’entreprise et qui relèvent de la sphère personnelle ne peuvent en principe pas justifier un licenciement disciplinaire.
Bon à savoir : Un licenciement non disciplinaire peut en revanche se justifier en cas de trouble objectif causé à l’entreprise.
En cas de licenciement disciplinaire, le salarié peut en principe obtenir la nullité de son licenciement.
Mais il y a une exception : lorsque le salarié manque à une obligation découlant de son contrat de travail comme le manquement à l’obligation de loyauté.
La Cour de cassation nous a donné deux exemples en 2024 de ce qui peut ou non constituer un tel manquement.
Elle a dit oui pour un salarié RH qui a une liaison cachée avec une déléguée syndicale (voir notre article “ Vie privée : une liaison entre un chargé des relations sociales et un représentant du personnel peut-elle aboutir à un licenciement ?”).
Mais elle a en revanche dit non pour un salarié qui parle politique en-dehors de son temps de travail. Le salarié est libre d'exercer ses convictions religieuses, philosophiques ou politiques. Voir notre article : Remettre un programme politique à des collègues : vie privée ou cause de licenciement ?
Tous les aspects de la vie personnelle du salarié ne relèvent pas de l’intimité de sa vie privée et ne sauraient s’analyser en une liberté fondamentale.
Il s’agit d’une nuance importante car en cas de licenciement, il sera dépourvu de cause réelle et sérieuse et non atteint de nullité (en l'absence de la violation d'une liberté fondamentale). Le salarié n’a alors pas de droit à réintégration automatique et pas les mêmes indemnités…
La Cour de cassation a fait cette distinction s’agissant de consommation de produits stupéfiants à bord du véhicule, constatés par un service de police sur la voie publique.
Le droit à la vie privée englobe le secret des correspondances. L’employeur ne peut pas utiliser le contenu des messages personnels émis par le salarié pour le sanctionner. Même s’ils sont envoyés grâce à un outil informatique mis à disposition par l’employeur.
Bon à savoir : Les salariés ont intérêt à identifier les messages et fichiers privés envoyés via leur messagerie professionnelle ou stockés sur leur ordinateur professionnel par une mention « personnel », sinon ils sont présumés avoir un caractère professionnel.
La Cour de cassation a précisé qu’un licenciement fondé, même en partie, sur le contenu de messages personnels émis par le salarié grâce à un outil informatique mis à sa disposition pour son travail, en violation du droit au respect de l'intimité de sa vie privée, entraîne à lui seul la nullité du licenciement.
Les fichiers identifiés comme personnels sur un ordinateur professionnel sont en principe protégés par le droit à la vie privée et l’employeur ne peut pas les ouvrir.
Il en va de même pour les fichiers contenus dans une clé USB personnelle, qui n’est pas connectée à l’ordinateur professionnel.
Si un employeur, d’autres salariés ou un syndicat diffusent le bulletin de paie d’un salarié, il y a atteinte à sa vie privée. Cela ouvre forcément droit à réparation.
Mais le droit au respect de sa vie privée peut être mis en balance avec d’autres droits notamment le droit à la preuve. Il n’est donc pas complètement interdit de diffuser un bulletin de paie en masquant les données personnelles si sa production est nécessaire au droit à la preuve.
C’est l’actualité la plus importante : la Cour de cassation considère désormais qu’une preuve obtenue de façon illicite ou déloyale n’est plus forcément écartée lors d’un procès. Il faut regarder si l'élément produit est :
Autrement dit une atteinte à la vie privée peut se justifier par le droit à la preuve
Vous pouvez consulter sur ce sujet notre article Enregistrer l’employeur, récupérer des e-mails : une preuve recevable.
En ce début d’année 2025, la Cour de cassation a aussi rendu une décision intéressante sur le cas de faits commis pendant un voyage organisé par l’employeur. Voir notre article à ce sujet.