Vous avez certainement entendu parler de l’exemple d’Amazon qui exige un retour complet de ses salariés en présentiel en leur laissant un délai de prévenance de quelques mois. Mais que dit le droit du travail en France sur ce sujet ? L’employeur peut-il décider d’un coup de stopper le télétravail ? Pour répondre à cette question, il faut s’intéresser à la façon dont le télétravail a été mis en place dans l’entreprise.
Le télétravail est normalement mis en place par un accord collectif ou, à défaut, une charte sur laquelle, vous, le CSE, êtes consulté.
Cet accord ou charte fixe les conditions de passage en télétravail, mais aussi les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail (C. trav., art. L. 1222-9).
Autrement dit, dès la mise en place du télétravail, les salariés doivent savoir dans quel cadre celui-ci sera arrêté. Il peut ainsi y avoir une clause de réversibilité par accord individuel et/ou collectif.
L’ANI sur le télétravail du 26 novembre 2020 prévoit que l’employeur et le salarié peuvent, à l’initiative de l’un ou de l’autre, convenir par accord de mettre fin au télétravail et d’organiser le retour du salarié dans les locaux de l’entreprise.
Important : des conditions peuvent être fixées comme un délai de prévenance. Dans ce cas, il faut suivre à la lettre ce qui est stipulé.
Attention, si l’accord ou la charte prévoient que le retour à une organisation sans télétravail se fait d’un commun accord ou par la signature d’un nouvel accord ou charte, l’employeur ne peut pas l’imposer tout seul aux salariés.
Si par contre l’accord ou la charte prévoit par exemple que le télétravail est institué de façon temporaire pour une phase d’expérimentation et que l’employeur peut décider d’un retour au bureau, ce dernier peut l’imposer sans difficulté.
Si le télétravail fait partie des conditions d'embauche, tout télétravailleur à une priorité pour occuper ou reprendre un poste sans télétravail qui correspond à ses qualifications et compétences professionnelles. L’employeur doit porter à sa connaissance la disponibilité de tout poste de cette nature.
Là encore, l’accord individuel conclu peut donner la possibilité à l’employeur ou le salarié de mettre fin au télétravail. A défaut, il faut un commun accord car stopper le télétravail revient à modifier le contrat de travail.
Illustration: une cour d’appel a rendu une décision à ce sujet en début d’année à propos d’une salariée embauchée par un CSE. La salariée travaillait depuis son embauche à son domicile, venant au siège du CSE une fois par mois bien que le contrat prévoyait à titre indicatif un lieu de travail au siège. Les juges ont considéré que lorsqu’il a été convenu de l’exécution de tout ou partie de la prestation de travail par le salarié à son domicile, l'employeur ne peut modifier cette organisation contractuelle du travail sans l'accord du salarié. Ici cette modalité d'organisation a été mise en place pendant plus de 5 ans et constituait donc un élément essentiel du contrat de travail, non modifiable sans l'accord de la salariée.
Certaines circonstances exceptionnelles (menace d’épidémie, force majeure…) peuvent justifier que l’employeur impose aux salariés du télétravail. Le télétravail est alors considéré comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés. Dans ce cas, la décision de recourir au télétravail relève du pouvoir de direction de l’employeur. Et c’est aussi à lui de stopper le télétravail quand la circonstance exceptionnelle prend fin.
Nous n’avons évoqué ici que le cas de l’arrêt du télétravail permanent. La règle est différente pour un retour ponctuel. L’ANI sur le télétravail du 26 novembre 2020 prévoit que l’employeur peut organiser les conditions du retour ponctuel du salarié en télétravail dans les locaux de l’entreprise en cas de besoin particulier, de sa propre initiative ou à la demande du salarié.
En tant qu’élu CSE vous avez un rôle important à jouer :
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